Focus sur les aides exceptionnelles destinées aux industries hôtelières

Focus sur les aides exceptionnelles destinées aux industries hôtelières
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La loi du 14 novembre 2020 place l’ensemble du territoire national en « état d’urgence sanitaire » jusqu’au 16 février 2021 inclus. Pour soutenir l’activité des TPE/PME fortement impactées par les fermetures administratives, le gouvernement a annoncé de nouvelles mesures de gestion de la crise sanitaire qui sont susceptibles de modifications ultérieures. Pour apporter la meilleure information possible aux entreprises, le ministère de l’Économie, des Finances et de la Relance a mis en place un outil d’aide en ligne visant à répondre à toutes les interrogations des chefs d’entreprises. Élaboré par la Direction générale des entreprises (DGE), avec l’appui de l’ensemble des administrations concernées et de la start-up d’État « Signaux Faibles », cet outil est consultable sur le site www.gni-hcr.fr/special-coronavirus-covid-19/aides-de-l-etat/faq-accompagnement-des-entreprises-coronavirus.


Chômage partiel revisité
L’article 18 de l’ordonnance n° 2020-1255 du 14 octobre 2020 relative à l’adaptation de l’allocation et de l’indemnité d’activité partielle, prévoit du 1er novembre au 31 décembre 2020, la possibilité de moduler par décret, non seulement le taux horaire de l’allocation versée aux entreprises mais aussi le taux horaire de l’indemnité versée aux salariés.
Pour le secteur des industries hôtelières, la prise en charge de l’activité (ou chômage partiel) sera de 100 % par l’État et l’Unedic au minimum jusqu’au 31 décembre, que ce soit dans le cadre d’activité partielle de droit commun (APDC) ou de longue durée (APLD). Selon l’évolution de la pandémie, la prise en charge du chômage partiel pourrait se poursuivre l’an prochain.
Selon un projet de décret transmis aux partenaires sociaux début septembre, les taux de droit commun devraient être fixés à 60 % (contre 70 % actuellement) de la rémunération brute de référence pour l’indemnité versée aux salariés. Quant à l’allocation d’activité partielle accordée à l’employeur, elle devrait être fixée à 36 % (contre 60 % actuellement) de la rémunération brute de référence.
Quant aux taux majorés, d’après les annonces répétées du gouvernement et confirmées par le Président de la République lors de son interview télévisée du 14 octobre, il devrait permettre le maintien à 100 % du chômage partiel pour les entreprises les plus touchées par la crise. Ce qui correspond au maintien du régime actuel jusqu’à la fin de l’année, qui resterait fixé à 70 % du taux horaire brut tant pour l’indemnisation du salarié que pour le remboursement de l’entreprise par l’État.


Aides du Fonds de solidarité réactivées
Durant le confinement, le dispositif de Fonds de solidarité sera réactivé et renforcé à hauteur de 6 milliards d’euros pour un mois de confinement. Le décret du 2 novembre 2020 modifie le fonds national de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de Covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation.
Les principales modifications apportées par le texte sont :
♦ Les entreprises et les commerces de moins de 50 salariés fermés administrativement pourront recevoir une indemnisation allant jusqu’à 10 000 € quels que soient le secteur d’activité et la situation géographique.
♦ Les entreprises du secteur du tourisme de moins de 50 salariés, restant ouvertes mais durablement touchées par la crise, subissant une perte de chiffre d’affaires d’au moins 50 %, bénéficieront également de l’indemnisation mensuelle allant jusqu’à 10 000 €.
♦ Pour toutes les autres entreprises impactées par le confinement de moins de 50 salariés qui peuvent rester ouvertes mais qui subissent une perte de plus de 50 % de leur chiffre d’affaires, l’aide du Fonds de solidarité pouvant aller jusqu’à 1 500 € par mois sera rétablie.
Toutes les entreprises éligibles, quel que soit le cas de figure, pourront recevoir leur indemnisation en se déclarant à partir de début décembre 2020. Le formulaire de demande d’aide est accessible sur le site des impôts : https://www.impots.gouv.fr/portail/professionnel
Le 10 novembre, le gouvernement a publié sur le site du ministère de l’Économie, une FAQ sur les dispositifs d’aides aux entreprises pour faire face aux conséquences de la crise sanitaire. Concernant le dispositif du Fonds de solidarité, des réponses pratiques sont apportées : https://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/covid19-soutien-entreprises/faq-mesures-soutien-economiques.pdf.


Exonération totale des charges sociales prolongée
Afin de couvrir totalement le poids des charges sociales pour les entrepreneurs touchés par la crise du Coronavirus Covid-19, le dispositif d’exonération des cotisations sociales sera renforcé et élargi :
♦ Toutes les entreprises de moins de 50 salariés fermées administrativement bénéficieront d’une exonération totale de leurs cotisations sociales.
♦ Toutes les PME du tourisme qui restent ouvertes mais qui auraient perdu 50 % de leur de chiffre d’affaires auront le droit aux mêmes exonérations de cotisations sociales patronales et salariales.
♦ Pour tous les travailleurs indépendants, les prélèvements des cotisations obligatoires seront automatiquement suspendus. Ils n’auront aucune démarche à faire.


Conditions d’éligibilité à la subvention « Prévention Covid »
Cette mesure a pour objectif d’aider les TPE et PME à réaliser les investissements nécessaires à la protection de la santé des salariés, et lutter contre la propagation du virus.
Lorsque le gérant d’une entreprise investit depuis le 14 mars ou compte investir dans certains équipements de protection


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ou de distanciation physique, la subvention « Prévention Covid » permet, sous certaines conditions, de financer jusqu’à 50 % de l’investissement HT réalisé par l’entreprise.
Cette subvention est destinée aux entreprises de 1 à 49 salariés. Le montant de la subvention est conditionné à un montant minimum d’investissement de 1 000 € HT pour une entreprise avec salarié. Le montant maximal accordé est plafonné à 5 000 €.
Depuis le 15 octobre, la demande de subvention se fait directement en ligne sur le site net-entreprises en passant par le compte accidents du travail / maladies professionnelles (AT/MP).


Les PGE seront contractables jusqu’au 30 juin 2021
Afin d’éviter la faillite d’une entreprise dont la trésorerie est fortement menacée par la pandémie de Covid-19, l’État peut se porter garant si celle-ci demande un prêt garanti par l’État (PGE) à sa banque ou à un intermédiaire en financement participatif.
La garantie de l’État s’élève à 70 % du montant du prêt et même 90 % pour les PME. Ce prêt peut représenter jusqu’à 3 mois de chiffre d’affaires et s’élever jusqu’à 2 ans de masse salariale.
Les entreprises pourront contracter un PGE jusqu’au 31 juin 2021 et non au 30 décembre 2020, ce qui fait qu’elles auront six mois supplémentaires pour contracter un prêt. Leur durée d’amortissement pourra s’étaler entre 1 an et 5 supplémentaires à un taux compris entre 1 % et 2,5 % maximum.
Les propriétaires d’un débit de boissons ou d’un restaurant devront obtenir un préaccord de sa banque pour le prêt, avant de se connecter sur la plate-forme de la Banque publique d’investissement (attestation-pge.bpifrance.fr), afin d’obtenir un identifiant unique. Sur confirmation de ce numéro, la banque accordera le prêt.
En l’état, le dispositif du PGE est mis en place jusqu’au 31 décembre 2020. Bruno Le Maire a cependant déclaré qu’il sera possible d’obtenir « un nouveau différé supplémentaire de remboursement d’un an » pour les prêts garantis par l’État, soit deux années au total.
Si l’entreprise n’a pas obtenu l’aval de sa banque, l’État s’engage à leur accorder des prêts directs. Ces prêts pourront atteindre jusqu’à 10 000 euros pour les entreprises de moins de 10 salariés, 50 000 euros pour les entreprises de 10 à 49 salariés. Pour les entreprises de plus de 50 salariés, l’État prévoit des avances remboursables plafonnées à 3 mois de CA.
Précisons que la Banque de France ne considérerait pas ces différés de paiement comme défaut de paiement.


Plan de relance tourisme
Pour soutenir les acteurs de la filière Tourisme, Bpifrance et la Banque des Territoires, en collaboration avec les ministères de l’Économie et des Finances et de l’Action et des Comptes publics, et les Régions de France ont développé une plateforme pour donner accès de manière simple et rapide aux dispositifs publics de soutien aux entreprises du secteur.
Les entreprises de la filière tourisme peuvent se rendre sur le site www.plan-tourisme.fr. Après avoir répondu aux 4 critères d’éligibilité, l’entreprise accède à l’ensemble des aides (financement, accompagnement...) qui lui sont dédiées en fonction de sa taille, ou de sa région par exemple.


La prise en charge des loyers
Dans le projet de loi de finances pour 2021, un crédit d’impôt pour inciter les bailleurs à annuler une partie de leurs loyers a été introduit par un amendement du gouvernement. Cette mesure bénéficiera aux entreprises de moins de 250 salariés fermées administrativement ou appartenant au secteur hôtellerie, cafés, restauration. Tout bailleur qui sur les 3 mois d’octobre, novembre et décembre 2020, accepte de renoncer à au moins 1 mois de loyer, pourra bénéficier d’un crédit d’impôt de 50 % du montant des loyers abandonnés. L’aide sera cumulable avec le Fonds de solidarité.


Numéro spécial d’information sur les mesures d’urgence
Un numéro spécial d’information sur les mesures d’urgence pour les entreprises en difficulté a été mis en place : 0806 000 245 accessible du lundi au vendredi de 9h à 12h puis de 13h à 16h.
Le service est assuré conjointement par la Direction générale des Finances publiques et l’Urssaf qui mobilisent deux centres d’appels afin de mener à bien une mission d’information.
Ce numéro est conçu afin de renseigner et guider les professionnels vers les aides d’urgence mises en place : reports de charges ou d’impôts, prêts garantis par l’État, le Fonds de solidarité, l’activité partielle, etc.


Un plan pour accélérer la numérisation des TPE
Pour aider et accompagner les restaurateurs, commerçants et indépendants à poursuivre leur activité grâce à la numérisation durant le confinement, le gouvernement publie un nouveau Guide Pratique qui recense conseils et bonnes pratiques en la matière.
Pour sensibiliser les professionnels aux outils numériques à mettre en place, 60 000 entreprises seront contactées par téléphone par les Chambres de commerce et d’industrie (CCI) et les Chambres de métiers et de l’artisanat (CMA) d’ici à la fin de l’année.
Un chèque numérique de 500 € va être accordé aux entreprises fermées administrativement, destiné à leur permettre de s’équiper en solutions de vente à distance. Cette aide concerne les professionnels de l’hôtellerie et de la restauration. Elle sera versée sur présentation de factures à l’Agence de services et de paiement à partir de janvier 2021.
40 offres promotionnelles proposées par des plateformes et prestataires labellisés par l’État et proposant des solutions numériques sont réunies sur la plateforme clique-mon-commerce.gouv.fr. Un MOOC ‘numériser ma TPE’ en lien avec France Université Numérique débutera le 15 janvier.


Aide financière exceptionnelle pour les travailleurs indépendants
Le Conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants (CPSTI) met en œuvre un dispositif de soutien dédié aux cotisants les plus impactés par les mesures sanitaires liées à la crise Covid-19. D’un montant de 1 000 € pour les artisans, commerçants et professions libérales et de 500 € pour les auto-entrepreneurs, cette aide financière exceptionnelle vise les travailleurs indépendants affiliés avant le 1er janvier 2020 et concernés par une fermeture administrative totale (interruption totale d’activité) depuis le 2 novembre 2020.


Par Patrick Gérolami, consultant


 


Le mandat ad hoc : un outil juridique qui permet de temporiser les impacts économiques de la crise sanitaire sur les groupes hôteliers


Par Me Philippe Blériot, administrateur judiciaire et Me Christopher Boinet, avocat In Extenso TCH Avocats


La négociation via le mandat ad hoc va se généraliser pour les groupes hôteliers en difficulté et ne sera plus réservée aux seuls hôteliers indépendants.


Pour engager un plan de relance et de restructuration, certains groupes hôteliers vont faire le choix de recourir au mandat


Me Philippe Blériot DR


ad hoc, avant toute injection potentielle de fonds propres de la part de la société mère (quand il y en a encore) dans leurs filiales d’exploitation hôtelière ou de restauration en difficulté.
Les mérites du mandat ad hoc ne sont plus à démontrer : en effet, avant de mettre « la main au pot », certains privilégieront ces outils juridiques qui ont fait leurs preuves en matière de prévention de traitement des difficultés des entreprises.
Le recours au mandat ad hoc offre de multiples avantages :
1. Bénéficier de l’assistance d’un professionnel de la négociation avec un administrateur judiciaire (très souvent) choisi par le dirigeant et ses conseils, qui exerceront la mission de mandataire ad hoc.
2. Obtenir (rapidement) la réunion des principaux créanciers autour de la table de négociations du mandataire ad hoc et pendant la durée des négociations, bénéficier de la suspension de l’exigibilité des créances existantes au jour de la date


Me Christopher Boinet DR


d’ouverture de la procédure, quelles qu’elles soient : créanciers fiscaux et sociaux, prêteurs, bailleurs, fournisseurs, franchiseurs hôteliers…
3. Négocier avec les créanciers des délais ou remises adaptés aux capacités de remboursement du débiteur, sur la base de la situation comptable à l’ouverture du mandat ad hoc et du prévisionnel (vérifiées par un auditeur indépendant).
Enfin, en cas de difficulté avec un créancier récalcitrant, il sera possible de convertir la procédure de mandat ad hoc en conciliation et d’obtenir du président du tribunal également des délais de paiement sur 24 mois. La société mère du débiteur hôtelier ou restaurateur va pouvoir cantonner son risque et ne sera ainsi pas sollicitée automatiquement par les créanciers de sa filiale (notamment par le jeu des garanties consenties en son temps en faveur de sa filiale), comme si elle l’avait été sans mandat ad hoc. Comme le confirment plusieurs présidents de tribunaux de commerce, les procédures de prévention de traitement des sociétés en difficulté ont triplé depuis le Covid-19.