
L’employeur a le droit de contrôler et de surveiller ses salariés, mais seulement dans le cadre d’un contrôle de leur activité et à la condition de les avoir informés préalablement. C’est en ce sens que la chambre sociale de la Cour de cassation a statué dans une décision rendue le 2 février 2011 (arrêt n° 10-14-263).
Dans cette affaire, un restaurateur mayennais qui avait obtenu l’autorisation auprès du préfet de Laval, a installé quatre cameras de surveillance dans son établissement, constate que l’une de ses employées détournait l’encaissement des consommations.
Dans les mois qui ont suivi l’installation de ces caméras vidéo, l’employeur constate visuellement à plusieurs reprises que la serveuse est parfois trop familière avec la clientèle. Il reprochait à son employée de ne pas encaisser toutes les consommations et ne pas faire payer certains clients de son entourage. Pour l’employeur, tout cela rendait impossible son maintien dans l’établissement et justifiait un licenciement immédiat pour faute grave, sans indemnités. Après la plainte de son employeur, cette serveuse qui a reconnu les faits, a fait l’objet d’un rappel à la loi notifié par le délégué du procureur de la République.
Dans une décision rendue le 20 septembre 2018, la chambre sociale de la Cour de cassation a estimé qu’il s’agissait dans cette affaire d’un licenciement abusif puisque les preuves des vols avaient été obtenues de façon illicite. Elle confirme l’arrêt de la cour d’appel qui a jugé que l’employeur n’a pas prouvé qu’avant les faits, la serveuse connaissait la présence de ces caméras. Au final, l’employeur a été condamné à lui verser 10 000 € d’indemnités au motif d’avoir omis de la prévenir et que les vols observés grâce à ce système de vidéo ne peuvent servir de preuve et fonder la sanction.
L’employeur doit informer son personnel de l’installation d’un dispositif de vidéosurveillance
L’employeur ne peut recourir à un procédé de surveillance qu’à la condition que l’atteinte portée aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives soit justifiée par la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché (art L 1121-1 du Code du travail). Avant de mettre en place ces procédés, l’entreprise doit au minimum informer individuellement par écrit ses salariés ainsi que le comité d’entreprise et le CHSCT (art L 1222-4 du Code du travail). En outre, le comité d’entreprise doit être informé et consulté (ou à défaut, les délégués du personnel) sur les moyens ou techniques permettant un contrôle de l’activité des salariés, préalablement à la décision de sa mise en œuvre dans l’entreprise (art L 2323-22 du Code du travail).
Toutes les personnes concernées par le dispositif de vidéosurveillance doivent être informées à l’aide d’un panneau de signalisation vidéoprotection affiché de façon visible dans les locaux filmés (loi n° 2011-267 du 14 mars 2011). L’information des employés et des visiteurs passe par la mise en place de panneaux visibles sur lesquels doivent être précisés : l’existence du dispositif dans l’établissement, le nom du responsable et la possibilité d’exercer son droit d’accès aux images.
Si le dispositif de vidéosurveillance fait l’objet d’un traitement informatisé ou d’un fichier structuré, il est nécessaire de faire une déclaration préalable à la CNIL. La loi « Informatique et Libertés » du 6 janvier 1978 prévoit que les images ne peuvent pas être conservées plus d’un mois. Si des procédures disciplinaires ou pénales sont engagées suite au visionnage des images, elles sont extraites de la caméra et conservées pour toute la durée de la procédure (https://www.cnil.fr/fr/la-videosurveillance-videoprotection-au-travail).
Précisons que les employés ont droit au respect de leur vie privée et les caméras ne doivent donc pas être placées de sorte à violer leur intimité. Les caméras ne doivent en aucun cas être installées dans le but unique de surveiller les salariés (délibération du CNIL en date du 17 juillet 2014 n° 2014-307).
Par Patrick Gérolami, consultant