Bar et nuisances sonores : bar à bruit, bar à (mauvais) thème

Bar et nuisances sonores : bar à bruit, bar à (mauvais) thème
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• Configuration des lieux : un immeuble, des logements et un bar en rez-de-chaussée – l’immeuble est, ici, « mixte » dans le sens où il abrite des logements d’habitation – dont certains destinés à la location – et une surface destinée à l’exploitation commerciale, un bar en l’occurrence.
• Hypothèse factuelle : location de logement mise en péril par le bruit du bar – un propriétaire d’appartement fait face au départ de son locataire. Celui-ci donne son congé car l’occupation paisible du logement est rendue impossible par les bruits en provenance du bar (musique amplifiée, cris de la clientèle, climatisation), bruits se manifestant en journée, en soirée voire la nuit.
• Action judiciaire du propriétaire : condamnation de l’exploitant du bar – ce dernier vient à disposer d’un rapport d’expertise – expertise judiciaire obtenue par décision d’une formation de « référés » - qui conclut : 1° - à l’existence de nuisances sonores ; 2° - aux effets délétères de ces nuisances (appartement rendu inhabitable). Versé aux débats, ce rapport convainc le Juge, lequel condamne l’exploitant du bar à dédommager le propriétaire (structuration et composition du dédommagement, notamment : 95 000 € au titre de la perte de chance de percevoir des revenus locatifs, 3 500 € au titre de la taxe sur les logements vacants). La durée des procédures et de leurs avatars (dont l’expertise) explique étiage et amplitude, dans le temps, de la période d’évaluation de la perte de chance ainsi impactée (63 mois).


 


Conclusion : défaut de proactivité de l’exploitant du bar facturé au prix fort – ce type de contentieux est porteur d’un enseignement précis. À savoir que dès lors que le différend émerge, l’exploitant a tout intérêt à trouver rapidement un terrain d’entente avec le propriétaire concerné. Car, à partir du moment où un expert judiciaire met en exergue la réalité des nuisances, les jeux sont faits. De sorte que la condamnation sera – en bout et fin de procédure – inéluctable et que plus le temps judiciaire aura été long, plus la période de non-location l’aura été à l’identique, accroissant de manière exponentielle la perte à indemniser. Par conséquent, la perspective de la réalisation de travaux d’isolation acoustique et/ou un changement de mode d’exploitation du bar s’imposent dès le moment de l’apparition du différend.
Conclusion bis : se méfier du règlement de copropriété ! – l’exploitant du bar s’expose à un autre risque si l’immeuble ressort du statut de la « copropriété » avec un règlement comportant des spécifications précises. À l’exemple d’une clause d’« habitation bourgeoise » garantissant aux occupants des logements (propriétaires et locataires) une jouissance paisible de leur surface et imposant une « discipline » cadrant l’occupation du ou des locaux commerciaux. Sur ce fondement, l’exploitant peut : 1° - voir son bail commercial mis en péril s’il ne respecte pas les obligations du règlement de copropriété ; 2° - être poursuivi par la copropriété elle-même en tant que collectif sur ce même fondement du non-respect du règlement intérieur.
TJ PARIS 5 novembre 2024, RG n° 20/03984