L’impact sur le chiffre d’affaires

Le 8 octobre 2006, le premier Ministre Dominique de Villepin a indiqué que la cigarette sera interdite dans tous les lieux publics à partir du 1er février 2007. Un sursis sera cependant accordé aux cafés, hôtels, restaurants, discothèques et casinos qui auront jusqu'au 1er janvier 2008. Un décret à paraître à la mi-novembre devrait préciser ces dispositions.

Une solution à l'italienne

Ce décret autoriserait la présence dans les CHR de fumoirs clos et hermétiques, dotés d'extracteurs d'air. Leurs portes devront être dotées d'un système d'ouverture manuelle et de fermeture automatique. La taille de ces pièces devrait être inférieure à 30 m2 et représenter 20 % maximum de la surface totale de l'établissement.

Pour contrôler la mise en place de ces dispositions, le ministère de la Santé a prévu de renforcer les contrôles. 210 000 agents assermentés - gendarmes, policiers, inspecteurs du travail et médecins de santé publique - seront chargés de dresser les procès-verbaux, payables par timbres-amendes. Toute infraction sera punie d'une amende de 75 euros pour les fumeurs et de 150 euros pour les responsables des lieux. Par exemple, un contrôle dans un restaurant où dix clients fument coûtera 1 500 euros à son patron. Cette loi s'imposera à tous et compte tenu des coûts de ces fumoirs clos et hermétiques, il est à parier que la plupart des CHR décideront d'être non fumeurs. C'est en tout cas ce qui s'est passé en Italie. Mais les patrons perdront-ils du chiffre d'affaires ? Une centaine d'études ont déjà été réalisées, pour évaluer l'impact de l'interdiction de fumer sur le chiffre d'affaires des CHR. Elles sont difficiles à juger, parce que chaque camp taxe l'autre de partialité. Dans certains cas cependant, il semble qu'il n'y ait pas eu d'impact négatif au moins à court terme. En Californie, le chiffre d'affaires des CHR a, par exemple, continué à croître après l'interdiction de fumer décidée en 1998. Même chose à New York où l'interdiction date de 2003. Dans l'année qui a suivi, les recettes déclarées par les restaurants et les bars de New York auraient augmenté de 8,7 %. De même, en Irlande, l'interdiction de fumer a été décrétée dans les pubs en mars 2004 et si les ventes ont bien diminué Evolution du chiffre d'affaires des pubs irlandais Janvier 2000 - décembre 2004de 4,4 % cette année-là, elles avaient déjà diminué de 4,2 % en 2003. L'interdiction de fumer n'a pas nécessairement aggravé les choses, mais elle ne les a certainement pas non plus améliorées. En fait, toutes ces études sont fragmentaires. Elles portent en général sur des périodes assez brèves et elles n'entrent pas dans le détail par segments ou par régions. Il est probable que l'interdiction de fumer a, par exemple, moins d'impact sur le chiffre d'affaires dans les restaurants que dans les bars ou dans les bars tabacs et l'impact n'est pas le même dans les grandes villes que dans les petits villages. A l'impact sur le CA boissons et nourritures, s'ajoutent enfin pour les buralistes, la baisse des ventes de tabac à proprement parler. Sur ce dernier point, le rapport de la mission parlementaire sur l'interdiction du tabac dans les lieux publics (présenté le 4 octobre 2006) se contente d'évoquer le «plan d'avenir». Un peu léger ! Certes, lors du dernier congrès de la Confédération des buralistes (5-6 octobre 2006), le ministre des PME, Renaud Dutreil a annoncé un certain nombre de mesures. Il s'est notamment engagé à renégocier le contrat d'avenir qui devait pourtant courir jusqu'à la fin 2007. Il a aussi envisagé d'accroître la commission que perçoivent actuellement les buralistes sur les ventes de tabac. Cette dernière est actuellement fixée à 6 % et la Confédération des buralistes demande qu'elle soit portée à 8 %. Renaud Dutreil a également évoqué un renforcement des aides pour les établissements situés proches des frontières et il a annoncé la mise en place pour 2007 d'un plan d'aide à la modernisation visant à aider les buralistes à diversifier leurs activités.

Il reste que l'interdiction de fumer dans les CHR risque de porter un coup aux professionnels. Et cela d'autant plus que l'Etat s'apprête à lancer une nouvelle campagne contre l'alcool. L'évolution du chiffre d'affaires du secteur CHRD dans les dernières années prouve que c'est un secteur sinistré. Ce qui est sûr, c'est que l'interdiction de fumer n'arrangera pas les choses. A l'Etat de prendre ses responsabilités. En attendant, les professionnels ont décidé de se mobiliser le 6 novembre prochain à la fois sous l'égide de la Confédération des buralistes et de l'Umih.